Comme s’il valait mieux construire sur le sucre que construire sur le sable, nos hommes politiques, très souvent supportés par des potentats du secteur économique dépouillés de tout sens patriotique, ont toujours fait de la « politique du pire » la seule issue possible pour Haïti. Hier comme aujourd’hui, celui qui est au pouvoir incarne le mal absolu aux yeux de ses opposants ; l’opposition, pour ceux qui jouissent effrontément des privilèges de l’Etat, ne se résume qu’à un tonneau vide d’où ne sort que du bruit, donc inapte à proposer quoi que ce soit de bon. En fait, dans cette République vieille de plus de 200 ans, la politique est un jeu de poker menteur où seul le peuple manipulé réussit toujours à échouer.
Comme un slogan de basse facture sorti de la bouche d’un petit Facebooker dépourvu d’idées, mais follement répété par les Zombies du mobile jusqu’à atteindre le statut facile de « populaire », la révolution est un mot aujourd’hui à la mode. Sur les réseaux sociaux comme dans certains médias traditionnels, adeptes du "Rache manyòk" et révolutionnaires nés de la dernière pluie se déchainent, se défoulent, vocifèrent jusqu’à faire se retourner dans leur tombe les Dessalines, les Lénine, les Castro… Ces « Usurpateurs de rôle » se disent prêts à tout pour sortir Haïti du bas-fond, mais dans la réalité de la réalité leurs mains sont totalement vides : pas de projet de société ! Ce ne sont que des bouches inutiles entrainées dans la prononciation de paroles utiles, destinées à la consommation des esprits naïfs. Rien de plus ! Et Dieu seul sait combien d’esprits naïfs habitent les 27 750 Km2 ; lesquels sont incapables de voir qu’aucun projet de société, qu’aucune bonne intention de « faire société », qu’aucune volonté de rétablissement de la Grandeur nationale ne se cachent derrière les innombrables appels au chambardement et à la révolution. La prise d’un Pouvoir mal géré… non géré, voilà le résumé du petit agenda des hommes politiques à bout de souffle. Les acteurs du processus de reproduction de la « politique du pire », les grands producteurs d’instabilités sont en marche, à bon entendeur, salut !
En somme, nous le disons sans risque : un peuple qui respire la misère, la déchéance, le désespoir, la mort… mérite bien mieux qu’un révolutionnaire sans projet, qu’un destructeur sans plan. Parce que l’oubli est une malédiction, tâchons de nous rappeler que bien des bouches qui, hier encore, s’étaient converties en « Porte-voix du peuple » se sont définitivement tues, parce qu’étant remplies il y a trente (30) mois. S’il est un truisme sur lequel les grands comme les petits Etats s’accordent, c’est que la Révolution est la vérité de la vie. Mais attention, depuis plusieurs siècles nous avons été avertis que : « Celui qui accomplit la révolution à moitié ne fait que creuser sa tombe ». Prétendre pouvoir faire la révolution sans projet de société, penser pouvoir détruire sans plan d’avenir bien construit, c’est accomplir sciemment un geste définitif, qui prend ici un nom impersonnellement triste : Suicide collectif.
GeorGes E. Allen
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